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Paul CLERFEUILLE

Extraits :

 

12 mars 1917 : « nous entendons quelques obus tomber et le bruit des mitrailleuses. Les obus tombent sur les ravins, sur les tranchées, sur le ravitaillement, dans les villages voisins : Paissy, Oulches, Vassogne. Ces villages sont détruits et complètement en ruines. »

 

28 mars 1917 : « les tranchées s'écroulent. Le mauvais temps et les bombardements en sont responsables. De temps à autre, il nous faut les relever. Des équipes y travaillent toutes les nuits avec pelles et pioches. »

 

30 mars 1917 : son régiment a fait un coup de main la nuit précédente et a ramené un prisonnier : « l'artillerie française, pour préparer ce coup de main, bombarde impitoyablement un coin de secteur très restreint, l'artillerie allemande répond sans arrêt. Ces tirs d'artillerie durent 5 heures. [...] Les Boches bombardent partout [...]. Les postes avancés dont je fais partie en tant que grenadier sont intenables sous une pareille mitraille. J'y passe quatre heures terribles qui me paraissent longues à l'infini. [...] Nous ne reconnaissons plus notre secteur, les tranchées et les boyaux n'existent plus. Nous avons à ma compagnie quelques blessés. Enfin, à 21 heures, le calme revient, seuls quelques 75 et 77 échangent quelques rafales d'obus. »

Au matin, la mitraille recommence : « gros obus et torpilles tombent sur nos positions. Les tranchées et boyaux sont complètement comblés, les abris effondrés en partie ; beaucoup de camarades sont enterrés sous les décombres, quelques uns blessés par les mitrailles, les poutres, les lourdes ferrailles, les pierres et matériaux de toutes sortes. »

 

1er avril 1917 : « nous travaillons toute la nuit pour relever nos tranchées éboulées, ainsi que les boyaux que le commandement n'a pas épargnés. Cette nuit, je vais avec plusieurs copains, poser des fils de fer barbelés. De temps à autre, les mitrailleuses nous tirent dessus, on se couche par terre, puis on recommence à travailler. [...] Le jour, quand nous voyons le terrain, ça fait frémir. Il semble que rien ne poussera plus sur cette terre. »

 

3 avril 1917 : « le bruit court dans le secteur que sous peu nous allons procéder à une offensive terrible à l'endroit où nous sommes, c'est-à-dire de Reims jusqu'à Soissons. Le plus fort sera la région de Craonne. » L'afflux de munitions et d'obus lui confirme cette rumeur.

 

11-12 et 13 avril 1917 : « toutes nos pièces [...d'artillerie...] tirent ensemble dans un fracas épouvantable, sans arrêt. [...] Par-ci, par-là, quelques obus allemands tombent, certains font des victimes, tant hommes que chevaux, et du matériel démoli. Par contre, les Boches doivent prendre quelque chose aussi. »

 

16 avril 1917 : « grande offensive de Craonne, lieu-dit Chemin des Dames. Attaque par les Français. Ce matin, 16 avril 1917 [...], après une nuit sans sommeil due aux préparatifs, dans l'inquiétude, [...] dernier ordre, attaque à 5 heures. [...Les combattants se rendent en première ligne face aux positions allemandes à prendre...] Déjà l'ennemi attend, il est prêt, il guette, il bombarde presque aussi fort que nous. Nous, notre bataillon, ainsi que tout le 273e [régiment d’infanterie], faisons partie de la deuxième vague d'assaut. Le pays est très cotoyeux, il faut grimper dans les coteaux et descendre des vallées abruptes et profondes. [...] Voici une heure que nous attendons ; la première vague part, mais est aux deux tiers fauchée par les mitrailleuses ennemies qui sont dans des petits abris en ciment armé. Nous devrions être partis depuis trois quarts d'heures. Nos camarades de la première vague ramènent trente prisonniers, puis, c'est à nous de partir, car le signal est donné à notre régiment. [...] les mitrailleuses et les obus pleuvent autour de nous ; nous heurtons des morts de la première vague, ainsi que de notre régiment parti il y a 15 minutes. [...] En haut, il y a une crête, il faut coûte que coûte y arriver. [... La neige commence à tomber...]

Après mille péripéties, nous arrivons à cette fameuse crête : nous avons laissé de nombreux morts et blessés en route. Ordre nous est donné de creuser des trous individuels. Moi qui ai entendu parler du plan, je sais qu'à cette heure nous devrions avoir déjà passé Craonne et être dans la vallée de l'Ailette. Je dis aux camarades : « Ça ne va pas ! » C'était vrai. [...] Les abris blindés des ennemis où sont les mitrailleuses et canons légers ne sont pas démolis, c'est cela qui nous empêche d'avancer davantage. [...] Enfin la nuit arrive avec ses heures d'angoisse ; il arrive aussi un ordre de monter en haut du plateau de Craonne pour prendre position. [...] Enfin, vers minuit, nous arrivons à l'endroit qui nous est désigné et que nous cherchons dans le chaos, les trous d'obus, les morts, les ténèbres, les engins de mort, la faim, la soif, l'inquiétude et la fièvre. [...] quelques tirs de barrage, des rafales d'obus tombent épars sur le champ de bataille. Les obus français passent sur nos têtes et tombent en avant de nous. Parfois, après ces éclatements, nous entendons des cris et des plaintes, probablement des blessés chez l'ennemi. Nous savons qu'en face il y a une mitrailleuse [... Au petit jour...] Quel spectacle ! Des tas de morts du 127e, 73e et 273e. Nous sommes écoeurés, nous avons les larmes aux yeux. [...] Le jour arrive, mardi 17 avril, nous sommes gelés et une eau glaciale a succédé à la neige. »

 

18 avril 1917 : « Les bombardements des deux artilleries durent toujours et nous sommes à demi sourds. C'est l'enfer ; le papier ne peut contenir et je ne puis exprimer les horreurs, les souffrances que nous avons endurées dans ce coin de terre de France ! Il faut y être passé pour comprendre. »

 

20 avril 1917 : la veille, sa compagnie est chargée d'aller relever des coloniaux : « nous passons cinq heures dans les boyaux, dans la nuit noire et toutes les embûches qui existent en ces lieux, sans compter l'eau, la boue, le froid et les ténèbres. Trous d'obus, fils de fer barbelés, on s'enfonce, on tombe, on se relève, et comme ça pendant cinq heures avec chargement et munitions. Tout au long du trajet nous trouvons des morts français, quelques Allemands ça et là. »

 

21 avril 1917 : « les canons n'ont pas cessé de tirer, encore et toujours le même bruit assourdissant. Le jour arrive pour nous faire découvrir de nouveaux cadavres. Quelques-uns trop près de nous sentent, nous les reculons. Un obus tombe sur un groupe de trois morts et en fait sauter un en l'air. Nous pensons : « Même morts, ils ne sont pas en paix. » »

 

22 avril 1917 : il rencontre d'autres soldats dans un abri : « ils ont comme nous faim et soif. Il n'a pas d'eau. [...] Enfin, on dort un peu malgré la tempête de bruits assourdissants que nous subissons depuis 15 jours et qui n'est pas finie. Après avoir dormi quelques heures, je m'éveille dévoré par les poux. [...] Je quitte ma flanelle et la jette. J'ai compté 200 poux et me suis lassé. »

 

Source : « Témoignage. Un simple soldat sur le Chemin des Dames : Paul Clerfeuille » in Le Chemin des Dames. De l'événement à la mémoire, sous la direction de N. Offenstadt, Paris, Stock, 2004, pp. 152-179.

Né le 13 décembre 1885 à Gençay (Vienne), Paul Clerfeuille a 34 ans lorsque la guerre est déclarée. Marié, père d’un enfant et dans l’attente d’une deuxième naissance, il exerce le métier de roulier à Civray. Son témoignage raconte son parcours u 5 août 1914 au 11 mars 1919. D’abord affecté au 325e RI, puis malade pendant presque toute l’année 1915, il part pour Salonique en janvier 1916 avant d’être évacué en juillet. Il revient en Champagne en novembre avec le 273e RI puis participe à l’offensive du 16 avril 1917.

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