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Gaston MOURLOT

Extraits : 

Vendredi 13 avril 1917

 

« D’après les papelards secrets, toutes nos actions sont réglementées jour par jour par les soins du GQG. […] Tout est bien compris, rien n’est laissé au hasard. Les ambulances et le ravitaillement sont compris comme étant à Laon. Les chasseurs de la 133e division suivent la vague d’assaut à deux kilomètres. […] Tout est étudié sauf la résistance possible. »

 

Dimanche 15 avril 1917

 

« L’animation, que je trouvais déjà grande depuis une quinzaine, s’est encore considérablement accrue depuis. L’artillerie circule, soulevant des nuages compacts de poussière. Les rares saucisses [dirigeables d’observation] boches qui se sont montrées ne peuvent arriver à signaler tant de mouvements car partout, sur toutes les routes, c’est la même chose. […] Je ne puis m’empêcher d’admirer le génie avec lequel l’occupation des routes est répartie, c’est un travail inouï. Nous devions pouvoir livrer passage aux convois d’artillerie dès 6h et ceux-ci devaient se suivre tous les quarts d’heure avec une précision mathématique. Les attelages arrivèrent à la file à l’heure fixée sans qu’un malencontreux encombrement en résultât. A la fin du travail, alors que l’on fait une courte pause, la vision que l’on a de tous côtés est sublime. Ce n’est que troupes en marche vers le nord à travers les champs pour laisser les routes libres. Malheureusement, le temps a l’air de se gâter en fin d’après-midi, dans la soirée, la flotte tombe assez drue.

 

Lundi 16 avril 1917

 

« L’élément liquide en cesse de choir que vers une heure. Cette déveine ne va pas donner un atout de plus à la réussite de l’attaque ; d’abord le terrain sera quelque peu détrempé et par suite d’une passée sous la lance [la pluie], l’ardeur des assaillants sera sûrement émoussée. Jusqu’ à minuit, l’artillerie donne sans arrêt et doit détruire les organisations de l’arrière, mais à partir de cette heure, je ne puis plus dormir tant le vacarme augmente d’intensité ; ce n’est plus qu’un roulement indistinct semblable au tonnerre continu. […]

 

[Quelques heures plus tard] C’est le défilé des blessés qui commence. Il n’est guère possible de recueillir quelques renseignements du dire de ces blessés. Ils racontent avec plus ou moins de justesse ce qu’il leur a semblé voir et qui est loin de s’accorder ensemble. En face plusieurs affirment que cela n’a pas marché, que plusieurs abris de mitrailleuses avaient été laissés intacts et que les Boches étaient fanatiques.

 

Mercredi 18 avril 1917

 

« Le soir nous voyons enfin les journaux, au tableau 13 500 prisonniers dont 2 500 faits à Aubérive, que nous avons pris aux Boches. Sur le communiqué officiel, la résistance des Teutons a été faite sur une grande échelle. Il y avait dix-neuf divisions à nous attendre, et pas des plus pourries, de là le piètre résultat de cette offensive pourtant admirablement préparée. »

 

Jeudi 19 avril 1917

 

« Par suite des minces résultats de l’attaque, il parait que nous ne monterons pas en ligne en face mais obliquerions sur la droite, vers Berry, où les lignes ont subi la plus grande fluctuation. »

Source : Extraits du témoignage de Gaston Mourlot, Un ouvrier-artisan en guerre, Moyenmoutier, Edhisto, 2012.

Né le 2 juin 1894 à Paris dans un milieu très modeste, Gaston Mourlot entre en apprentissage dès 14 ans chez Abel Bataillard ferronnier d’art après avoir obtenu le certificat d’études. Incorporé à 20 ans avec sa classe par anticipation en septembre 1914, il n’a pas connu la vie de caserne avant guerre. D’abord fantassin, il intègre le génie à partir de 1915 et met à profit sa formation technique au profit de l’organisation matérielle et logistique du front.

Il connaît d’abord le front de la Somme en novembre 1914, puis successivement la Champagne, la Marne et l’Aisne, puis l’Argonne. Il passe par deux fois par le front de Verdun. Il est ensuite sur le Chemin des Dames début 1917 et le 16 avril.

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